Bionettoyage L’argumentaire de la CGT pour une autre alternative

149


La Direction répondait en 2010 qu’il n’y avait pas matière à débat, que des économies de l’ordre d’un million d’euros étaient réalisées mais également que le choix de la sous-traitance était dicté par un constat de carence grave dans la propreté des locaux confiés aux ASH !!!
Devant le refus de dialoguer opposé par la Direction, la CGT n’avait pas hésité à alerter les membres du Conseil de Surveillance et le Président de la Chambre Régionale des Comptes.
Enfermée dans une optique de confier à des opérateurs privés tout ce qui n’était pas « cœur du métier », la Direction a persisté en publiant un appel d’offres en juillet 2010.
Le nouveau cahier des charges introduisait la notion de protocoles d’hygiène par type de locaux  et laissait le soin aux entreprises de déterminer les moyens humains à mettre en place pour les respecter.
On sortait ainsi de la pratique antérieure où un nombre d’heures de travail était demandé par chaque service.
Il était également demandé par la Direction de supprimer la présence d’agent d’entretien dans le service sur la plage horaire de 14 à 18 heures.
Une option était également prévue pour envisager de confier au privé la distribution des repas aux patients.

En 2011, une pétition CGT « Bionettoyage : copie à revoir » recueillait plus de 200 signatures de soignants ulcérés par l’absence de prise en compte de leurs besoins, de la réalité des services en matière d’hygiène et des glissements de tâches soignantes vers le secteur privé.
Devant cette levée de boucliers soutenue par de nombreux cadres de santé, la Direction n’a pas eu d’autre choix que d’ouvrir un espace de négociation avec la CGT.
Ont ainsi pu être acté les points suivants :
– une redéfinition des besoins par les équipes de chaque service,
– un débat autour des tâches hôtelières et de restauration,
– la mise en place d’une permanence les après-midi
La Direction s’était également engagée à faire régulièrement le bilan avec les organisations syndicales.

En 2012, après de multiples relances pour obtenir de la Direction le bilan promis, la CGT a lancé un questionnaire adressé aux équipes sur le thème « questionnaire pour un hôpital propre »
Les résultats rendus en janvier 2013 sont édifiants : seuls 19% des services jugent leur service suffisamment propre et 13% trouvent satisfaisantes les conditions de travail de la société ELIOR (ex SIN&STES) !
La CGT a donc interpellé à nouveau la Direction et obtenu péniblement un bilan plus que sommaire voire partial des prestations réalisées par la société ELIOR
En parallèle, courant avril, la CGT du CPN s’est rapprochée de la CGT d’ELIOR pour œuvrer ensemble à construire de meilleures conditions de travail et d’hygiène pour tous.

La CGT revendique qu’avant tout nouvel appel d’offres (et avant juin 2014), la Direction et les organisations syndicales puissent ensemble travailler sur un bilan et mettent ensuite en œuvre la meilleure solution sans parti pris.
La CGT est intervenue en ce sens lors du CTE du 10 décembre 2013 pour demander à nouveau un audit sur le marché bionettoyage (qui s’élève quand même pour notre établissement à 3 millions d’euros par an !)
La Direction s’était engagée à réaliser une étude précise et exhaustive mais ne voyant rien venir, la CGT prend les devants en réalisant son propre audit.

Notre analyse, nos arguments et nos questions :

Depuis de nombreuses années, la CGT du CPN intervient pour proposer des alternatives à la privatisation du bionettoyage dans notre hôpital.

1°) analyse financière

Au 31 décembre 2012, ELIOR employait au CPN, 86 équivalents temps plein (ETP) et facturait la prestation plus de 2,7 millions d’euros.
A titre de comparaison, le CPN ne dépenserait que 1,7 millions d’euros pour employer directement 86 ETP d’ASH statutaires de la fonction publique.
(base : indice brut 315 soit environ 19 500 euros bruts par an, prime comprise)

Soit une différence de 1 million d’euros par an représentant plus de 51 postes ASH !

La Direction met en avant qu’il faut envisager tous les coûts annexes :
– embauches supplémentaires à la DRH pour assurer les paies et carrières de ces nouveaux agents,
– lourdeur de gestion des plannings pour les cadres de santé,
– coût du matériel et des produits d’entretien.

Le 1er argument sur les personnels nécessaires à la DRH n’est pas remis en cause par la CGT mais pour autant, il faut bien avoir conscience que l’intégration de 60 agents supplémentaires à l’UHSA et la mise en place du Développement Professionnel Continu se sont faits eux à moyens constants !
Le manque de personnels DRH ne date donc pas d’aujourd’hui et ne peut être imputé uniquement à une embauche d’ASH.

Concernant la surcharge de travail pour les cadres, il s’agirait uniquement de rajouter 1 ou 2 professionnels sur le planning du service.
Quant aux absences des ASH, un pool de suppléance pourrait voir le jour et être gérer par le B.P.E.A.S. à l’image des paramédicaux.
Il est difficilement compréhensible d’entendre la Direction parler de charge de travail supplémentaire pour l’encadrement quand on connaît le temps passé actuellement par ces mêmes cadres pour suivre le contrôle des prestations et faire appel à la suppléance ELIOR ….

Sur le coût des matériels et produits d’entretien, la CGT pense qu’au vu des économies potentielles, il ne sera pas trop compliqué pour le CPN d’acheter des produits qui aujourd’hui manquent trop souvent aux agents ELIOR !

La CGT est d’accord avec la Direction sur le fait d’envisager tous les coûts mais encore faut-il examiner les économies découlant de la fin de la gestion administrative du dossier bionettoyage :
– coût de traitement administratif de la passation de l’appel d’offres (plusieurs mois de travail)
– coût du traitement administratif de l’exécution du marché (courriers, liquidation et mandatement des factures, gestion des pénalités, ….)
– coût des salaires des 2 agents CPN affectés au suivi du bionettoyage (ces derniers pourraient sans problème être réaffectés sur d’autres postes)

2°) analyse qualitative :

L’enjeu sur ce dossier reste de définir le terme de propreté des locaux à l’hôpital.

La Direction se contente uniquement d’apprécier si le protocole a été respecté par la société de nettoyage.
Il en résulte une différence de lecture puisque le niveau de qualité mesuré par la Direction sur 2012 oscille entre 80 et 90% de satisfaction !
Un comble quand on rapproche ces chiffres de l’enquête CGT réalisée auprès des soignants (19% de satisfaits seulement !)

Les contrôles des prestations aboutissant à des non-conformités doivent donner lieu à l’application de pénalités.
Quand on sait que sur 2 ans, la Direction n’a appliqué que 6 000 € sur 6 millions d’euros de montant du marché, il y a de quoi y perdre son latin !

Il ne s’agit pas pour notre organisation syndicale de chercher à stigmatiser les agents d’entretien d’une entreprise extérieure mais au contraire à démontrer l’impact de leurs conditions de travail sur l’hygiène des locaux hospitaliers.

La Direction et les agents doivent prendre conscience que derrière un cahier des charges envoyé à une entreprise extérieure se cache l’application des règles propres à l’univers impitoyable du nettoyage : 1 agent doit effectuer un rendement estimé à 300 m² par heure !!!
Peu importe que le CPN pose des exigences en terme de respect de protocoles hygiène si derrière, les sociétés privées répondent avec aussi peu de réalisme et ne pensent qu’au seul profit !

Pour appuyer nos dires, il faut savoir que le nombre de personnes affectées au ménage a diminué considérablement au fil des ans.
Ainsi, selon les chiffres de la Direction, le prestataire ELIOR qui employait sur le CPN 111 équivalents temps plein en 2009 n’en affecte plus que 86 en 2013 (soit – 25%)
A ce rythme là et dans un contexte où on nous martèle qu’il faut faire encore plus d’économies, à combien estimera-t-on le nombre d’agents d’entretien nécessaires pour le nouveau marché 2015 ?
Quels standards de qualité et d’hygiène seront alors acceptables pour la Direction ?

La CGT pointe également l’absence de formation des agents d’entretien à l’hygiène hospitalière.
Pourtant, la Direction certifie que des formations au bionettoyage en milieu hospitalier ont été réalisées auprès de 80% des agents employés par ELIOR mais avec quel contenu ? Mystère !
Sur la formation au sens large, la Direction avance même le chiffre de 50 jours de formation (hygiène, incendie et sauveteur secouriste du travail) par an pour l’ensemble des agents ELIOR soit quand même 1 demi-journée par ETP et par an !!!

Dans ces conditions, la CGT estime qu’il est humainement impossible de prétendre réaliser un travail de qualité et de respecter les procédures d’hygiène hospitalière.

De même, la CGT a maintes fois condamné certaines dérives visant à contourner les décrets de compétences soignantes en transférant certaines missions vers le personnel ELIOR (repas, désinfection des lits, …) Et en 2015, pourquoi pas les médicaments sous couvert (bien sûr !) de la vigilance des infirmiers !?
 

La proposition de la CGT

Réintégrer la prestation bionettoyage en interne en embauchant les personnels en place avec un statut d’ASH fonction publique hospitalière.

Les avantages :

– générer des économies en reprenant des ASH (certains hôpitaux l’ont fait avec réussite),
– amélioration du niveau de propreté des locaux en s’appuyant sur une solide formation des ASH à l‘hygiène hospitalière et sur des protocoles internes adaptés aux attentes spécifiques de chaque service,
– permettre une présence continue des professionnels ASH, intégrés à l’équipe pluridisciplinaire,
– reprendre certaines activités annexes abandonnées petit à petit (lingerie, couture, … .)

La CGT demande à la Direction de revoir sa copie et réaffirme qu’une autre option est possible pour l’entretien des locaux dans notre hôpital.

La CGT du CPN, en lien avec le syndicat CGT de la propreté, exige une réunion rapide CHSCT / CTE avant la fin avril 2014.

La CGT du CPN prend ses responsabilités et interpellera tous les acteurs, y compris politiques, pour sensibiliser chacun à nos propositions.
Au vu du bilan actuel, il est urgent d’inverser la politique visant à confier au privé les missions du service public.