Cinq grands changements majeurs survenus au cours des dernières décennies expliquent cette épidémie de maladies chroniques :
- La nourriture ultra-transformée et l’agriculture productiviste ;
- Les inégalités sociales croissantes ;
- Le travail et le développement de son intensité ;
- La concentration urbaine et les pollutions qui en découlent ;
- La contamination chimique généralisée (plastiques, engrais, etc.).
Cette progression des pathologies chroniques concourent aussi à l’accentuation des inégalités dans l’accès aux soins et à la santé ainsi que la fracture entre catégorie sociale avec les différences d’espérance de vie symbolisant les échecs de 40 années de politique de santé. Cette situation est une atteinte à la démocratie et aux valeurs fondatrices de notre République.
Cette loi ne répond pas à cette situation et s’inscrit dans la logique mortifère des précédentes.
La seule motivation de cette loi est d’envisager de faire des économies en réduisant les dépenses de santé. Elle aggrave, par certains côtés, la loi Bachelot notamment en renforçant la place et l’autorité des ARS sans aucun contre-pouvoir. Elle impose la mise en place de groupements hospitaliers de territoires (GHT). Cette mesure constitue un outil permettant l’accélération des restructurations hospitalières, la désertification médicale et le non accès aux soins pour des millions de familles tant des banlieues abandonnées que des campagnes oubliées. Alors que les urgences ont frôlé la catastrophe lors de la récente épidémie de grippe, les hôpitaux devraient encore économiser 3 milliards d’euros, ce qui se traduirait par 22 000 suppressions d’emplois.
Pour autant, nous ne suivons pas le mouvement des médecins libéraux.
Sous couvert d’un discours mettant en avant les intérêts des patients, c’est bien ceux de professions corporatistes qui motivent leur opposition à la loi, même si les généralistes sont dans une situation très difficile qui justifie leurs demandes de revalorisation de leur profession par rapport aux autres spécialistes.
En effet, quelle est la principale revendication ? Le refus du tiers payant. Pour quelle raison ? Parce qu’alors le seul reste à charge pour les patients sera les dépassements d’honoraires qui ont tendance à se généraliser. Ainsi, les assurés sociaux, pour lesquels il est très difficile aujourd’hui de s’y reconnaître dans un système très complexe, auraient une connaissance immédiate de ces sommes qui vont directement dans la poche des médecins et ils pourraient éventuellement en contester la légitimité.
La mise en place du tiers payant généralisé sera aussi une formidable occasion de s’engager dans une simplification nécessaire du système, gage de démocratie, de qualité et d’efficacité. Oui le temps médical est si précieux qu’il ne doit pas se dissoudre dans de la gestion administrative et suivi de comptabilité.
Ce qui impose un double flux de transmission des informations du professionnel de santé vers la Sécurité sociale et les complémentaires pour la demande de prise en charge du règlement à celui-ci. Dans un deuxième temps, la Sécurité sociale informe le professionnel de santé, en coordination avec les complémentaires, de l’ensemble des règlements effectués.
Même si la généralisation du tiers payant ne règle pas les deux problèmes que sont la rémunération à l’acte et le désengagement de l’Assurance maladie obligatoire au profit des assurances complémentaires, il s’agit tout de même d’une mesure favorable aux assurés sociaux, au regard de ce qui se passe depuis plusieurs années pour les médicaments.
Nous voulons une loi cadre pour une politique de santé
Celle-ci doit pouvoir répondre aux enjeux de société, facteurs déterminants du développement des maladies chroniques et d’accroissement des inégalités et de la double peine du monde ouvrier et employés (plus d’années d’invalidité au sein d’une vie plus courte). Ces cent dernières années, l’amélioration de la santé des populations est due à 80 % à l’amélioration des conditions de vie et de travail et à 20 % au progrès de la médecine. C’est bien cette dégradation récente qui pose problème et entraîne cette augmentation des maladies chroniques.
Poursuivre dans cette logique économiste conduit à ce paradoxe dramatique, plus les maladies chroniques augmentent, mieux les budgets des hôpitaux se portent puisqu’ils sont évalués à l’activité.
Nous ne séparons pas la prévention du soin. La définition de la santé par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), ce n’est pas seulement l’absence de maladie mais un bien-être social psychologique et physique.
Les réformes se sont succédées depuis plus de vingt ans sans apporter de réponses adaptées sur la base des deux principes qui doivent, selon la CGT, fonder notre système de santé :
1. Une prise en charge des dépenses de soins et de santé toujours mieux couvertes par la Sécurité sociale;
2. Un service public associant la médecine de ville et l’hôpital pour une politique de réseau de santé au plus près des populations.
Pour cette raison, la CGT revendique une loi-cadre rappelant les principes d’organisation et de financement de notre système de santé, intégrant toutes ses composantes afin de s’engager résolument dans cette reconquête d’une Sécurité sociale de haut niveau et dans le renversement nécessaire de logique : le passage d’une politique du soin pour l’essentiel porté par la réparation à une politique de santé tournée vers la prévention, l’éducation et la promotion du travail et de la santé. Ainsi que la prise en charge de l’autonomie mais aussi les questions du médicament et de l’industrie pharmaceutique et de la recherche.
La CGT, dans la préparation de son Congrès, va élaborer dans les mois à venir cette loi-cadre qu’elle mettra en débat.