Revision de la loi du 27/06/1990 LETTRE OUVERTE AUX SALARIES

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Sous prétexte d’une simplification des procédures d’hospitalisation sous contraintes de la loi de 1990, nous assistons à un élargissement de la contrainte aux soins.
Sous ce titre faussement humanisant, se cache en fait la question du «soin obligatoire».
Cette loi s’articule principalement autour de préoccupations sécuritaires, le concept « de surveillance » vient percuter notre conception du soin.
Une fois de plus, les soignants deviennent les garants de l’ordre social relégués à un rôle de gardien, avec pour mission le contrôle des patients, par l’obligation de rendre compte du non respect du contrat de soins à notre hiérarchie administrative.
Cette loi renforce l’intolérance de la société vis-à-vis de la maladie mentale. Elle stigmatise le malade et l’enferme dans la durée sous l’étiquette irrationnelle de la dangerosité sans perspective d’évolution.
 
Dans notre quotidien professionnel.
Tout professionnel de la psychiatrie devient auxiliaire de police puisqu’il aura l’obligation d’informer le directeur de l’établissement de la moindre absence du patient à un rendez-vous.
Le directeur en référera au Préfet.
Il n’est pas question de s’interroger sur la raison de cette absence, maladie, dépression, fatigue, empêchement…
Un planning de « soin » comparable aux exigences posées aux détenus en probation ou en injonction de soin sera établi. Etonnants soins, puisque seule la garantie de présence est requise.
Si le patient présent se contente d’être assis dans le CMP, le patient peut-il être considéré comme ayant été pris en charge ?
De même le soin peut-il se réduire à une simple distribution de médicaments ?
Comment s’occuper les patients dans un planning obligatoire pré pensé ?
La mise en place de protocoles de soins définissant la périodicité, la fréquence, le lieu et le type de soins peut devenir une pièce à charge contre l’équipe soignante, voire un soignant.
Avec cette réforme, non seulement le gouvernement continue à ne pas assumer ses responsabilités en proposant les réponses adaptées aux difficultés de la psychiatrie. Mais dans le contexte de délabrement que traverse la psychiatrie propice aux dysfonctionnements, il engage la responsabilité individuelle (disciplinaire voire pénale) de chaque soignant contraint de garantir les procédures et protocoles de soins obligés.
Les files actives en constante augmentation, les fermetures de lits, sans moyens supplémentaires pour les soins et le suivi en ambulatoire, ont rendu le travail de secteur pratiquement impossible.
Notre travail a perdu beaucoup de sens, le travail sur le terrain du patient ne peut plus se faire et nous recréons l’exigence que celui-ci vienne sur le notre.
Dans un contexte de démantèlement de la psychiatrie publique de secteur où le manque de personnel, la déqualification des postes, la précarisation des emplois, les formations inadaptées, les plans de retour à l’équilibre budgétaire, les restructurations des lieux de soin, la dégradation des conditions de travail, ont mis les professionnels en difficulté pour remplir l’ensemble de leurs missions, comment apporter une réponse de qualité aux besoins de la population ?
La précipitation avec laquelle le gouvernement s’empresse à légiférer en restant sourd à la contestation qui s’exprime depuis plusieurs mois dans toute la communauté psychiatrique, en dit long sur le peu de considération qu’il nous accorde.
Voilà plus de 20 ans que nous attendons une réforme de la loi de 1990.
 
Aujourd’hui, nous voulons plus !
 
La Fédération CGT Santé et action sociale exige donc :
– Le retrait du projet de loi relatif « Aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et à leurs modalités de prise en charge », portant révision de la loi du 27 juin 1990.
– Un moratoire sur les restructurations en cours.
– Un réel état des lieux de la situation de la psychiatrie publique et du dispositif de sectorisation.
– Un vrai débat démocratique avec tous les acteurs du soin psychiatrique, les usagers, les citoyens et les élus, afin d’aboutir à une loi d’orientation et de programmation pour la psychiatrie publique.
 
LA FEDERATION CGT SANTE ACTION SOCIALE
 
Montreuil, le 16 Mai 2011